dimanche 25 décembre 2011

PUMPING UP !




Si vous croyez que lors des week end de courses où j'accompagne les jeunes je fais beaucoup de ski, vous vous trompez!
Il s'agit surtout de soulever des kilos de matos toute la journée, de répéter les mêmes gestes pendant 3 jours, de se faire du souci pour trouver le bon fart, d'avoir des courbatures aux bras et de se taper les voyages aller-retour bon pied-bon oeil quand les jeunes dorment à poing fermé derrière.
Ca commence avec le chargement du bus: 2 caisses de 20kg de matériel, l'une pour la glisse, l'autre pour le fartage. 4 autres petites caisses pour le matériel divers, les 2 housses à skis, les 2 tables à farter démontables, la tente de 3m sur 3 avec ses murs qui pèse aussi son poids (env 25kg) et tous les petits détails indispensables: le tapis de biathlon que je glisse sous la table à farter quand nous sommes en extérieur pour nous isoler de la neige et éviter de glisser, le rangement pour les skis en bois que nous a gracieusement et astucieusement fabriqué Simon Desthieux, très habile de ses 10 doigts! Il y a des fentes dans lesquelles on glisse les talons de skis et ceux-ci restent debout sans se casser la gueule en dominos! La fiche scotchée sur le mur avec les heures de départ de chacun. La grande bâche à étaler par terre dans les garages des hôtels pour éviter de salir. La pelle et la balayette.
Une fois que tout est bien rangé dans le coffre, (j'aime bien que tout soit bien rangé) et vérifié qu'il ne manque rien, c'est le départ. Une fois arrivés sur place, la piste reconnue, débute le montage-démontage qui sera fait chaque jour : sortir la caisse de glisse, installer les tables de fartage, sortir les housses, étaler la bâche, donner les instructions pour le fartage.
Ensuite, à 18h, comité de course où les conditions de compétitions sont discutées entre coachs et organisateurs, distribution des dossards, petit apéro au cours duquel nous discutons des dernières nouvelles, nous débriefons la course précédente.
A 20h, repas avec l'équipe, réunion de course entre nous où je donne les consignes pour le lendemain : horaires de départ, dossards mais surtout remarques sur la piste, sur ce que j'attends de chacun, sur les choses à faire ou non etc. C'est un moment très important où se concentrent les informations que j'ai accumulé dans ma tête tout au long de la journée. Mon discours doit être clair, positif, enthousiaste, transmettre l'envie, la motivation, réveiller les consciences et appuyer sur les qualités de chacun pour qu'ils aient un point auquel se raccrocher le lendemain, un déclic. Si j'ai des griefs, des critiques, des humeurs, ça doit être dit dès le début pour ensuite passer aux choses constructives et les laisser sur une note positive. Il faut répondre aux questions, rassurer, écouter les propositions, toujours anticiper !!
Si les conditions de neige sont particulières, par ex une neige béton le lendemain, on peut prendre la décision de farter en classique la veille, à condition que la météo soit stable... Ce qui est rarement le cas! Je me souviens l'an dernier à Arvieux (Queyras) où les organisateurs nous garantissaient le beau temps le matin suivant, où j'ai farté 12 paires de skis avec une base klister dure et où nous nous sommes réveillés sous la neige !! Gros stress, je peux dire que j'ai râlé! Mais ce qui m'a rassurée, et fait rire, c'est que je n'étais pas la seule: nous étions 3 comités à défarter les skis pendant que les autres passaient en plaisantant près de nous...
Si je n'ai rien à mettre sous les skis, je démonte le matériel dont j'ai besoin et le charge dans le bus puis je vais me coucher.
Si j'ai du travail sur les skis, je choisis de le faire le soir car je n'aime pas vraiment me lever trop tôt!
A 6h, lever, petit-déj, voyage jusqu'à l'emplacement de la course. La plupart du temps, on n'a qu'à sortir du bus et installer le matos à quelques dizaines de mètres. Sur d'autres sites moins abordables, il faut se trimballer le matos sur le dos plusieurs centaines de mètres plus haut, plus bas ou plus loin. Parfois des scooters nous aident mais sinon, on teste notre capacité à porter un truc super lourd sans penser aux doigts sciés sur la poignée, aux bras tétanisés, au dos en vrac! Et on transpire un bon coup.
Montage de la tente pour s'abriter des intempéries et des regards avec l'aide des jeunes, aménagement du matériel sous la tente et le travail commence.
Si c'est une course en classique, il faut être là 2h avant pour avoir le temps de tout faire avant le 1er départ.
En arrivant, on a déjà une petite idée de la neige, de sa structure, de son histoire, des produits qui risquent d'aller et il faut aussi penser à lever la tête pour humer l'air du temps: va t-il tomber quelque chose dans les heures qui viennent? Quand arrivera le soleil? Comment est orienté le terrain? Etc.
J'ai 3 paires de ski et en général quelqu'un avec qui travailler. On échange nos impressions sur la neige, on sort les quelques produits susceptibles d'aller, on farte chaque ski d'une façon, on le note et on va tester. C'est là qu'on croit qu'on fait bcp de ski...Oui, si on n'arrive pas à trouver le bon fart assez tôt, on risque de tourner un moment et les jambes fatiguent. Car le principe, c'est de tester le fart dans une montée et à fond si possible! Sans échauffement. Quand on la gravit pour la 5ème fois, on est échauffé mais la première fois, elle fait mal!
L'autre jour à Mouthe avec mon adjoint, on a farté une paire de skis, on a fait une montée, on est revenus sous la tente et en 1 min, le fart était trouvé. Terminé, je n'ai pas retouché les skis du matin. Coup de bol. Ca va rarement si vite!
Le pire, c'était à Méribel l'an dernier pour les championnats de France: il faisait 20° la journée et -5° la nuit. Le matin, on arrivait sur de la neige glacée et vitrifiée, une patinoire. Le 1er jour, j'ai eu des sueurs froides car je ne trouvais rien qui fisse l'affaire entre la glisse et l'accroche, ça reculait ou ça accrochait deux fois trop. Je commençais à paniquer, l'heure du fartage des skis de compétition des coureurs approchait et je n'avais rien à mettre de valable. Puis, j'ai fait des recoupements entre plusieurs produits testés et je me suis décidée. Mais j'ai dû faire 5km de tests, farté plusieurs paires de skis pour y parvenir.
Après ça, je note toujours ce que je farte, les références sont super importantes.
En fait, le pire c'est de trouver un fart qui va super bien sous mes skis mais qui ne convient pas du tout aux jeunes. Ou qui se révèle catastrophique comparé aux fartages des autres équipes sur la piste. Car nous ne mettons pas la même chose. Certains aiment bien mélanger les matières, d'autres sortir des produits rares. Il n'y a pas de règles, parfois je suis obligée d'appliquer 2 ou 4 produits en couches et toutes sont complémentaires et ont leur utilité. D'autres fois, une seule couche suffit et ça va du tonnerre!
Le fart est trouvé, il reste à farter les skis des coureurs, à ce qu'ils les testent et à corriger si besoin.
Avant le 1er départ, je vais sur la piste pour les regarder passer et les renseigner.
Le 1er travail sur le fartage est terminé, commence le second travail sur l'humain qui est l'essentiel de la mission. En les regardant sur la piste, je vais me faire une opinion sur leur forme, leur motivation, leur engagement, leur façon de mettre en valeur leurs qualités, leur façon d'utiliser la piste pour y perdre le moins de temps possible. Parfois, je fulmine, d'autres fois je suis agréablement surprise.
Le plus délicat restant la manière avec laquelle je vais faire passer ce que j'ai vu et ressenti à propos d'eux après l'effort. Je sais que je dois laisser certains tranquilles un moment après la course avant de leur parler. Mais ils ont tous droit à leur speach à chaud, très important selon moi, et individuel.
La synthèse n'est pas facile, il faut prendre du recul, analyser et discuter avec les intéressés. J'essaie d'être toujours constructive. Il m'arrive d'être cassante ou dure et c'est justifié. Parfois un bonne claque (au figuré) réveille et fait prendre conscience. Je garde toujours à l'esprit la façon dont je pourrais accueillir moi-même les remarques que je fais aux autres et cela me permet de rester dans la compréhension, l'échange, le respect. Il faut sans cesse regarder les choses dans leur ensemble et recentrer, recentrer.
Vers 13h, tout est fini, démontage du matos, retour à l'hôtel pour manger, se reposer. Mais à 15-16h, il faut farter les skis pour le lendemain. Ou aller skier pour régénérer l'organisme.
A 18h, je retourne au comité de course etc. Même scénario que la veille.
De nouveau réunion de course entre nous avec dernières remarques pour le matin, remarques des coureurs envers moi car je suis ouverte à la critique aussi. Et objectifs du lendemain.
Et le lendemain matin, si la course est en skate, le travail est plus décontracté. On gagne une demi-heure car comme tout le monde a un fartage de glisse imposé, il ne reste qu'à trouver une bonne structure et ça se trouve rapidement. Mais il aura fallu encore monter la tente, les tables, défaire les skis, tester, etc.
Parfois quand l'endroit est beau, la neige glissante, la forme bonne, je vais skier pendant les pauses pour me faire plaisir. Mais j'ai souvent les bras en compote, les jambes cuites et je n'aspire qu'à rentrer chez moi pour me reposer! Et il faudra démonter, ranger, nettoyer le réduit à fartage à l'hôtel et conduire pour rentrer.
Une fois à la maison, je me force à décharger le bus dès que j'arrive même si je suis crevée, la chose est faite et je peux me reposer enfin!
Ce n'est pas de tout repos mais ces week-end infernaux parfois sont l'essence de mon boulot, j'y trouve l'adrenaline, le stress constructif, les doutes, les espérances, les bonnes surprises et les réussites, les déceptions et le découragement et c'est pour ça que j'aime ce travail. Entraineur, je suis de l'autre côté de la barrière et c'est tout aussi excitant. Très éprouvant, difficile, parfois ingrat mais excitant.
Et puis quand l'énergie circule entre les athlètes et moi, ça m'encourage à aller de l'avant, à trouver toujours de nouvelles façons de les faire progresser, de les amener à leur meilleur niveau. Il faut encourager cet état d'esprit.
Voilà, c'était un petit aperçu de mes week-ends d'hiver...

mardi 6 décembre 2011

DELIRIANT

Une nouvelle fournée de ces mots nouveaux que les français inventent au gré de leur vie et qui enrichissent notre langue avec humour!
Le Monde Magazine dit qu'il existe un festival XYZ du mot nouveau dont la dernière édition s'est tenue au Havre fin novembre. Je vous fais une liste exhaustive de ces néologismes et vous encourage vivement à en créer vous-même!!
-Ordinosaure : se dit d'un ordinateur dépassé.
-Bête seller : un navet s'arrachant dans les bacs des librairies.
-Aigriculteur : pour le paysan écoeuré des difficultés de son métier.
-Eurogner : nouveau mot très au fait de l'actualité pour exprimer le climat économique et européen ambiant...
Ce festival couronne un mot parmi les autres, "une conception vivante de la langue qui, comme l'écrivait Victor Hugo, meurt si elle n'invente pas de mots nouveaux" selon le festival.
L'an dernier le terme de "Phonard" désignait une personne en situation de dépendance à son téléphone (insup-) portable...
Cette année, j'adore le nouveau mot trouvé : "Attachiant". Je trouve que ça définit exactement une personne assez insupportable mais dont on ne saurait se passer!
Et j'ai qualifié ce festival de ... déliriant !
A vos plumes !

lundi 24 octobre 2011

BONNE NOUVELLE !!

REMISSION : diminution momentanée d'un mal.
C'est la bonne nouvelle qui nous a été annoncée vendredi 21 octobre. , les images des scanners et Pet-scan montrent que les 2 foyers ganglionnaires se sont presque totalement résorbés ainsi que celui sur l'os de la clavicule. L'activité cellulaire est retombée. Leyla a bien répondu aux 2 premiers traitements, c'était le meilleur des scénarios. Reste à savoir s'il y aura besoin de radiothérapie, ce qui nous sera dit le 7 novembre.
Quand l'infirmière nous a annoncé cela, Leyla avait les larmes aux yeux. Ma mère en a pleuré et nous avons tous enfin pu respirer plus librement !
Leyla s'est bien battue pour ça! Fin septembre, suite à une aplasie et une infection, elle a passé 2 semaines à l'hôpital dans un état qui nous a laissé groggy! Nous n'étions pas prévenu de cela, qu'un patient sur dix peut réagir de cette manière, que Leyla était plus susceptible de réagir brutalement à la toxicité des produits. Nous avons assisté impuissant à une semaine de fièvre à 40° avec la tension à 7 et le pouls à 140. Quand la fièvre tombait sous le coup des analgésiques, c'était à 39° pendant à peine une heure et demie puis elle remontait illico. J'avais des sueurs froides à tâter son pouls qui n'avait plus rien du pouls de sportive qu'elle est, il était filant, palpitant bizarrement mais il me donnait des références. Parfois en la regardant et en tâtant son joli crâne, je trouvais qu'elle était fraîche. On appelait l'infirmière pour qu'elle prenne la température mais elle était quand même à 39.6... S'il n'y avait eu que cela.
Outre la fièvre, l'aplasie c'est à dire les valeurs des globules blancs, rouges et des plaquettes en dessous de la normale. Elle est tombée jusqu'à 5 d'hémoglobine! Pour la faire remonter, il a fallu 2 transfusions de globules et des boosters de moelle osseuse, type EPO.
Ensuite les diarrhées qui la vidaient de ses forces.
Et enfin "the last but not the least..." la mucite, une forme d'aphtes généralisés et uniformes dans la bouche et la gorge, conséquence des effets secondaires de la chimio. C'est ce qui l'a fait le plus souffrir. Sa salive était visqueuse, sa gorge gonflée, la douleur rayonnait dans les oreilles. Impossible d'avaler quoi que ce soit, de parler car les cordes vocales étaient prises. Elle était irritée dans tout le tube digestif, du début à la fin. Au début, les anti douleurs pour les enfants lui faisaient du bien car ils la faisaient dormir sans douleur. Mais quand elle se réveillait, ça revenait. Ils lui ont donc proposé de passer à la morphine avec une pompe automatique avec laquelle il est impossible de surdoser ni de devenir dépendant. Et ça lui a fait beaucoup de bien. Elle est passée sur l'échelle de la douleur de 9 à 7, voire 5. Ce qui fait une grande différence!
Elle est restée dans cet état près de 6 jours à ne rien pouvoir avaler ou presque, nourrie par perf avec de l'hydratation, des vitamines, des acides aminés mais ça va un temps. Elle a commencé à avoir les jambes qui gonflent à cause du manque de protéines et comme elle allait un peu mieux, il m'a fallu l'assister pour qu'elle se remette à manger. Ca n'a pas été une mince affaire. On organisait les journées autour des repas à venir en préparant la bouche, l'estomac et surtout la volonté à remanger. C'était tout un cérémonial au cours duquel avec persuasion et douceur, je devais l'amener à accepter d'avaler les repas hypercaloriques et hyperprotéinés. Ce sont des petites bouteilles au lait ou au jus de fruits très caloriques mais écoeurantes à force. Quand elle pouvait en boire les 3/4, c'était formidable et je la complimentais. Et en deux jours, ses jambes étaient redevenues normales. Puis ce furent quelques cuillérées de soupe, de purée ajoutées. Une semaine plus tard, elle avait retrouvé la sensation de faim. Aujourd'hui, elle a reprit 5 kilos et mange de bon appétit!
Il ne faut pas me reprocher mon souci du détail en ce qui concerne les maux dont a souffert ma fille. Car après cette période épuisante où nous nous sommes relayés auprès d'elle, son père et moi pendant 12 jours, j'ai été amenée à reconnaître que nous, quidam n'ayant jamais été confrontés à cette maladie auparavant de près ou de loin, nous ignorions totalement ce que le mot "cancer" signifiait! D'abord il fait peur et je peux le comprendre. Mais il y a des centaines de cancers différents : les lymphomes, les carcinomes, les mélanomes, les tumeurs, les nodules, les leucémies, les taches etc. Et il y a des centaines de traitements différents pour les soigner. Certaines personnes avec qui j'ai parlé m'ont dit qu'elles n'avaient pas perdu leurs cheveux, d'autres si. Que certaines supportent bien les effets secondaires, pas les autres. Que certaines avaient dû rester enfermées dans une chambre stérile, d'autres non.
On ne connait pas le cancer. Dans le meilleur des cas on voit la personne malade entrer à l'hôpital et en ressortir un certain temps plus tard guérie, on nous parle de chimios, de rayons X mais on ignore ce qui s'est passé et ce que le malade a vécu. Et j'ai l'impression que cette méconnaissance, ce mystère entretient la peur, nous pousse à en savoir le moins possible. Ce n'est pas une maladie honteuse ni contagieuse, on guérit 1 cancer sur 2 ou 3 dans la plupart des cas ce qui est follement encourageant et magnifique! Réfléchissons à cela quand il y a 30 ans, on annonçait à quelqu'un qu'il avait un cancer. C'était encore tâtonnant et très handicapant. Aujourd'hui, en partie grâce aux dons privés, la recherche a progressé énormément, les hôpitaux européens et internationaux travaillent de concert, les équipes rassemblent leurs expériences et font avancer les traitements. Leyla aurait pu être soignée de la même façon en Allemagne comme aux Etats-Unis.
Et dans son malheur elle a eu de la chance. Elle n'est pas encore guérie totalement au point de dire qu'elle est débarrassée définitivement de son lymphome mais elle est sur le bon chemin. Dans 2 ans, on sera fixé. Je dis qu'elle a de la chance car parmi les mamans avec qui j'ai lié connaissance à l'hôpital, d'autres enfants sont partis pour des parcours de soins s'étalant de 6 mois à 18 mois, voire sur plusieurs années. Comme la petite Alice qui a une forme rarissime de lymphome, 8 cas en 10 ans dans le monde et qui, malgré l'absence de visibilité, de prévision pour son cas, réagit bien aux traitements. Ou ce petit garçon en traitement depuis 6 ans pour 2 tumeurs au cerveau et une leucémie dont je ne connais que la maman. Cette maman est formidable, elle est là pour lui à temps plein, nous la soutenons du mieux que nous pouvons le matin au petit-déjeuner et en y repensant, lui et toute sa famille doivent retourner à la Réunion ces jours car il en a exprimé le désir. Et cet autre adolescent de l'âge de ma fille qui a déjà été soigné il y 2 ans pendant 18 mois et qui, aujourd'hui, refuse les traitements, se rebelle et que sa mère a toutes les peines du monde à faire retrouver ses esprits. On croise toutes les formes de la maladie dans les murs de Léon Bérard, toutes les tranches de la population et si Leyla ne doit y rester en traitement que 6 mois, nous disons merci mon Dieu !!
C'est vrai qu'on est confrontés à un autre monde. On prend des gens de tous les jours et on les plonge dans ce monde de l'oncologie. On en ressort différent.
Leyla l'a dit tout de suite au début de sa maladie : je sortirai forcément différente de cette maladie et si on refuse les changements que la maladie va avoir sur soi alors, on peut en mourir.
Elle a raison : sauf cas grave ou incurable, si on ne veut pas changer, on en meurt. C'est une suite d'acceptations dont le malade sort transformé ainsi que ses proches. On voit la vie sous un jour tellement différent après ça.
Je ne juge personne, chacun fait comme il le peut avec ce qu'il a. Et moi j'ai envie de partager, de montrer la réalité pour mieux faire connaître cette maladie. Quand les rescapés des camps de concentration rentraient chez eux, on leur faisait comprendre que la vie continuait et qu'ils devaient se taire. Je n'ai pas envie de réagir ainsi avec les survivants du cancer. Un conseil que je vais suivre moi-même à l'avenir : quand une personne me dira qu'elle est malade, je ne chercherai pas à la rassurer en lui disant des banalités, à écourter la conversation parce que j'aurai peur. Pour peu qu'elle ait envie d'en parler, je chercherai à savoir ce qu'il en est, à la soutenir du mieux que je pourrai et à penser à elle souvent.
Heureusement, notre entourage a été très compatissant et présent, nous avons une famille, des amis et des proches exceptionnels. Certains prient pour Leyla, d'autres pensent beaucoup à elle et toute cette énergie positive a agi aussi pour la mettre sur la voie de la rémission. On ne vous dira jamais assez merci !!!

mardi 27 septembre 2011

LIVESTRONG

DIMANCHE 2 OCTOBRE

habillez-vous de jaune pour afficher votre solidarité

à la lutte contre le cancer qu'organise la fondation

LIVESTRONG.

mercredi 14 septembre 2011

ERIN BRONKOVICH

J'ai un peu plus de détails concernant les forages de gazs et pétrole de shistes.


Pour un seul forage, il faut 8 millions de litres d'eau et 100 000 litres de produits hautement toxiques. Le forage se fait en profondeur puis en latéral et le tout sera injecté entre 1500m et 3000m de profondeur. Il faut créer une pression dans la poche où devrait se situer les hydrocarbures pour les faire remonter, si besoin est.


Le Haut Bugey se situe dans un relief karstique avec des strates calcaires ayant subi des déformations via le plissement des Alpes si bien que le sous-sol n'est pas plat, je veux dire que les strates en profondeur ne sont pas planes, en couches bien rangées comme dans un sandwich. Au contraire, elles suivent les plissements de la surface et sont parcourues par des failles, des affaissements sous-terrains, des nappes phréatiques plus ou moins grandes, des torrents sous-terrains, etc. Injecter ce genre de produits présente donc un grand danger car sous pression, les produits de toute sorte ressortiront en pleins d'endroits. Comment peuvent-ils garantir que ça n'arrivera pas?


On est habitué par les disparitions de cours d'eau qui ressurgissent à des kilomètres plus loin et il faut bien s'imaginer que les produits injectés feront le même chemin, surgissant dans le lac de Nantua, polluant les nappes phréatiques venant du Rhône qui nous alimentent en eau (des milliers de personnes) et condamnant non seulement l'avenir touristique déjà balbutiant de notre région mais également l'avenir agricole en forçant les paysans à acheter l'eau pour nourrir leurs bêtes, pour arroser leurs cultures alors que dans certains villages, ils n'ont qu'à se brancher sur la source du coin pour subsister.


Et nous condamnant tout court.


Du côté de la législation, un texte a certes été voté pour interdire l'exploitation et le forage des hydrocarbures de shistes en juillet mais quelques jours plus tard, sous la pression de TOTAL et de la compagnie anglaise qui avaient déjà signé des contrats pendant le règne de J.L Borlo, les sénateurs ont adopté en douce (à 158 voix contre 161, les 2 sénateurs de l'Ain ayant approuvés ce texte) ont donc adopté une loi pour permettre le forage. Sinon, les 2 compagnies pétrolière assigneront l'état français devant les tribunaux.


Dans les régions où les citoyens se sont opposés à ces forages, les compagnies ont déjà engagé des actions en justice pour mettre la loi en application. Ils se croient tout puissant. Alors certes une loi est passée mais pourquoi devrions-nous nous y conformer? Oui, je suis prête à désobéir à l'état car cette loi va à l'encontre du bien-être des citoyens et de leur santé, au profit des sociétés pétrolières qui, elles, ne pensent qu'à leurs profits.


On va me rétorquer que je suis bien contente de rouler en voiture, que le pétrole me rend service... Le moteur à eau existe depuis les années 60 et son concepteur a été muselé et payé pour ne jamais divulguer sa recette. Les moteurs hybrides et électriques voient difficilement le jour chez nous car la volonté est d'enrichir les compagnies pétrolières. C'est sûr que la pression est énorme sur nous : on supprime des arrêts de TGV dans les gares, les réseaux de bus sont simplistes, il faut faire des dizaines de kilomètres pour trouver un hôpital, une pharmacie, bientôt ce seront les écoles... Tout est fait dans les campagnes pour nous forcer à prendre la voiture et nous obliger à accepter au forceps, le concept de forage et d'exploitation de gazs et pétrole de shiste.

Et bien non.

Moi je dis NON. Et vous?


Delphyne Burlet

lundi 12 septembre 2011

MOBILISONS-NOUS!

Mobilisons-nous tous pour empêcher les forages de pétrole de shiste dans notre région du Haut Bugey, plus précisément sur le plateau de Retord, dans la combe des Moussières (Lachat).


Le gouvernement français laisse la société "Celtic Energie Petroleum"continuer ses forages dans l'héxagone malgré la loi interdisant l'exploitation des gazs et pétroles de shiste. Et ces derniers menacent de trainer l'état français devant les tribunaux pour rupture abusive de contrat s'ils ne peuvent pas forer comme convenu antérieurement à la loi.


Vous savez tous ce que signifie les forages : infiltration de produits hautement chimiques avec risques de pollution des nappes phréatiques à long terme, pollution et destruction des plans d'eau, lacs alentour par des résurgences de ces produits, par le biais du réseau karstique de notre région, nuisances sonores et olfactives. Et pourquoi forer si l'exploitation est interdite?


Si vous ne savez pas ce que va engendrer ce système de forage polluant, si vous avez envie de vous battre pour préserver la nature sauvage et authentique de notre territoire de moyenne montagne, de notre beau plateau de Retord, si vous voulez contrer les décisions absurdes de notre gouvernement, il y a une réunion d'information ce soir 12 septembre à Nantua à la salle l'Eden (à côté de la mairie) à 20h.


Allez sur le site du Collectif Haut Bugey : STOP AUX GAZS DE SHISTES !! lisez les news et signez la pétition !!


D.Burlet

vendredi 26 août 2011

WIE GEHT'S ?




Les vacances, enfin! Nous en avions rêvé, nous y sommes allés et nous en avons profité!

















Bien-sûr, il y a l'épée de Damoclès au dessus de la tête de Leyla et le corps médical nous a donné carte-blanche pour partir. Mais même s'il n'avait pas donné son accord, nous serions partis. On avait bien attendu 2 mois pour savoir, les médecins pouvaient bien attendre 10 jours pour nous revoir.


Je suis heureuse de reprendre la route, cette route tant de fois arpentée pendant mes années de sportive biathlète je la connais par coeur : Genève, Berne, Zürich, Liechtenstein, Bregenz.


Notre destination est la Saxe, Schwarzenberg plus exactement, les Erzgebirge (montagnes de fer). Le voyage étant long, j'ai décidé de le faire en 2 parties. Nous nous arrêterons en Bavière. Mon choix se porte sur GAP (Garmisch Partenkirchen) mais finalement, ce sera Schwangau au pied du très célèbre château enchanté de Louis II de Bavière.


Mon fils pense à ces vacances depuis 2 mois et n'a cessé de faire le décompte, jour après jour. Maintenant que nous y sommes, il est heureux comme un pape! Nous voyageons dans la voiture que François nous a prêté, une Polo VW idéale pour ce voyage : économique, petite, agréable.


J'ai l'argent du séjour en poche car ma carte bancaire de "pauvre" ne fonctionne pas à l'étranger. Tout est comptabilisé: l'hébergement, le gasoil, les extras.


Les derniers 100km sont difficiles pour les enfants qui en ont marre. Les montagnes se font plus hautes et plus pointues et nous attendons de voir avec impatience le fameux château... Il arrive à notre vue au dernier moment avec ses tours d'un blanc cassé, très élégant, élancé vers le ciel. Il est tout à fait en harmonie avec le paysage alentour, ne déparre pas avec la nature sauvage, il est vraiment magnifique.


Pour notre 1ère étape, j'ai trouvé au dernier moment sur internet des chambres avec petit-déjeuner pour 18€ par adulte. Les moins chers! Tout le reste, c'est du luxe! Pas moins de 35€ par personnes, parfois même 50... Même les hôtels sont moins chers.


En arrivant, nous trouvons nos chambres dans une ferme au centre du village chez un fermier sportif et skieur où ça sent bon le lait caillé et le foin. Des fermes comme celle-là, on en trouve plus chez nous! Avec le foin en vrac dans la grange au dessus de l'écurie, les toiles d'araignées sur les poutres basses du plafond blanchi à la chaux, une écurie petite prévue pour 10 vaches à lait. Il y a un veau à peine âgé de 3heures qui tremble sur ses jambes. Le fermier m'explique qu'il est né avec le cul en premier et qu'il s'est étouffé avec le liquide amniotique ce qui lui donne cet air ahuri, pas bien réveillé. Je crois rêver! Une ferme comme ça, ça me rappelle mon enfance car depuis 20ans c'est terminé, les écuries sont devenues des stabulations énormes qui puent le lisier où les vaches ne semblent jamais bien à l'aise. Je fais une généralité mais avec les fameuses normes...ce sont des établissements sans âme! Le fermier donne à ses vaches du bon foin sec, des poires sauvages de son jardin, il dit qu'il est le dernier des mohicans avec ses 10 vaches!


Egor est tout heureux dans ce décor rural mais n'oublie pas de faire ses caprices.


Nous allons manger dans le premier restaurant venu, l'hôtel de la Poste et là non plus, nous n'en croyons pas nos yeux! Je vais commander un délicieux jarret de porc au chou rouge (Schweinachse mit Sauer Kraut) et sa knödel, Leyla va manger des Kässpatzeln et Egor une assiette de charcuterie avec des frites, le tout arrosé de bière à la levure pour moi (Hefe weiss) et de jus de pomme avec de l'eau gazeuse (Apfelshorle) pour les petits. L'addition? 33€.


Cette première soirée est magnifique, empreinte du calme qui règne dans ce petit paradis bavarois et qui ne laisse pas de place à la tristesse qui ne manque pas d'affleurer de temps en temps quand nous pensons à la maladie de Leyla. Nous en parlons librement toutes les deux. Je ne peux m'empêcher de la câliner un peu plus, de lui demander comment elle va etc. Je sais que si j'en fais trop, elle me le dira!


Ce sont des vacances studieuses néanmoins où Leyla va continuer de s'entrainer. Elle a pris ses skiroues avec elle. Le lendemain, nous n'allons pas courir avant le petit-déj car il pleut. Et nous prenons la route pour le seconde moitié du voyage.


Nous retrouvons le beau temps vers Hof et nous arrivons à Schwarzenberg vers 16h. J'ai pensé à ces vacances d'abord pour que Leyla puisse rencontrer sa famille paternelle qu'elle ne voit pas souvent et avec laquelle j'entretiens de bons rapports. C'est vrai que ça paraît bizarre alors que je suis divorcée d'avec son père depuis plus de 10ans mais c'est comme ça. Pourquoi se priver de la compagnie de personnes gentilles, sympathiques et intelligentes? Leyla est toujours ma fille et en cela sa famille paternelle toujours proche. Nous nous écrivons régulièrement, ils suivent sa progression sportive et je ne suis pas germanophobe!!


Quel plaisir pour moi de retrouver ce pays que je n'ai pas revu depuis plus de 10ans. J'ai vu les changements entre 89 et 95, entre le moment où la Ost Deutschland est devenue l'Allemagne réunifiée et je vois encore des changements, des améliorations. Les maisons ne sont plus du tout grises et moches mais claires et bien entretenues, les jardins sont plantureux, les voitures dignes de leurs voisins de l'ouest et les magasins et autres supermarchés toujours plus nombreux.


Quel plaisir aussi de reparler allemand. Leyla aura un peu de mal à tout comprendre, à pouvoir formuler des phrases (une année avec un prof moyen...) et je lui dirai que j'étais comme elle au début, à comprendre un mot par phrase. Il faut plusieurs mois pour se sentir à l'aise et comprendre, parler. Egor nous épatera en nous sortant les leçons apprises en primaire avec sa maîtresse! Il va chercher à comprendre, à faire des phrases, à s'intéresser, un futur globe-trotter!


Karin, la grand-mère paternelle de Leyla nous accueille et nous passerons en sa compagnie de bons moments là-bas. Elle nous a trouvé un bel appartement de vacances chez une de ses connaissances et nous nous installons confortablement. Un grand débat suit pour savoir qui dormira dans le petit lit du salon. Après maintes tergiversations, Egor (ça ne peut être que lui) décidera finalement de dormir avec sa soeur dans la même chambre et j'hériterai du salon et de la télé par la même occasion!!


Ce même Egor, à qui j'ai promis-juré d'acheter des jouets en arrivant et qui n'a pas la mémoire courte, nous pousse à nous déplacer dans un grand magasin où, devant la quantité de jouet énormes de la marque "Bruder", il ouvre des yeux effarés. Il les voudrait tous évidemment et finit par se décider pour un gros camion benne. Mais une fois à la maison, repensant à l'étalage généreux du magasin, il nous fait savoir qu'il ne sera content que lorsqu'il aura eu le 2ème jouet promis! Et oui, c'est tout Egor ça! Sa soeur lui fera le cadeau du 2ème. "T'es trop gentille Leyla!" dit-il avec ses petits yeux vert magnifiques qui nous font fondre. Et bien que connaissant la bête capricieuse et changeante, nous adorons son air de petit ange!


Pendant ce séjour, nous dégusterons des glaces délicieuses pour 1.40€ les 2 boules (quand je verrai la boule de glace à 2.50€ à Annecy, je comprendrai où se situe l'arnaque!)


Leyla va s'entrainer avec sérieux et elle est en forme; elle court bien, skie bien. Mais à la fin du séjour, elle a de plus en plus de mal à se lever le matin... La fatigue liée à la maladie gagnerait-elle du terrain?


En compagnie de Karin, nous rendons visite à la famille proche: ils ne changent pas, toujours aussi gentils et sympathiques, profitant de la vie dans leur jolie maison agrémentée d'un beau jardin où les enfants s'amusent.


Les enfants prendront le train à vapeur jusqu'à OberWiesenthal tiré par une magnifique locomotive pimpante et bien graissée. Puis nous visiterons le nouvel aquarium, jouerons au bowling et mangerons au resto. Avant que Leyla n'aille faire 1h de skiroues sur la piste flambant neuve à côté. Ce jour-là, en attendant qu'elle fasse sa séance, Karin et moi nous ramasserons des myrtilles et nous gèlerons les doigts! Il faisait 8°!


C'est bientôt l'heure de partir hélas, le temps passe trop vite mais nous apprécions d'être loin de la maison, des mails, du téléphone. Nous lisons, jouons au scrabble et réfléchissons. Leyla continue de prendre des photos. Je commence à sentir la fatigue tomber sur mes épaules et la tristesse aussi et j'ai parfois les larmes aux yeux le matin...Leyla a acheté une plaque d'émail où il est noté : "Ich weiss was ich denke, wenn ich höre was ich sage."


Même si le temps n'a pas été chaud, cela nous a suffi et nous avons passé une excellente semaine. Nous disons au revoir à Karine qui se soucie également de sa petite fille et partons en direction de Franckort.

HODGKINS LYMPHOM

Bonjour tout le monde, ça faisait longtemps que je n'avais papotté sur ce blog...


D'une part il y a eu les vacances à l'étranger (bientôt en images sur le blog!) et d'autre part, l'annonce de la maladie de ma fille.


Au mois de mai, Leyla avait remarqué un ganglion à la base du cou, entre la clavicule et le muscle trapèze. Son père qui ne laisse rien au hasard pour ce qui concerne la santé l'a de suite emmenée chez le docteur. Ce dernier, ayant rarement vu cela, a fait le nécessaire pour que l'énigme soit résolue : analyses de sang avec des données de globules blancs un peu haut mais pas encore significatifs. Echographie où le docteur a trouvé suspects les ganglions (au nombre d'une dizaine cette fois après à peine un mois) et a demandé à faire une biopsie. Les résultats de cette biopsie ont montré la présence de lymphocites B et T, ceux-là même qui luttent contre les cellules cancéreuses mais sans qu'un diagnostique puisse être véritablement établi. Et enfin extraction d'un ganglion pour l'analyser tranche par tranche et résultats la veille de partir en vacances.


Je ne suis pas allée beaucoup regarder sur internet car il s'y dit tout et son contraire et tant que nous ne savions pas ce qu'elle avait, ça ne servait à rien de psychoter. J'avais néanmoins opté pour cette maladie vu les rares symptômes que Leyla montrait, c'est à dire des ganglions gonflés et des démangeaisons derrière les genoux. Pas de sueurs nocturnes, pas de fatigue ou de perte de poids, elle se portait comme un charme et était plutôt en forme! Un site médical canadien très bien renseigné m'avait fourni les explications que je cherchais et je n'ai plus regardé autre chose jusqu'à avoir les résultats des tests.


Il s'est passé 2 mois entre la 1ère visite chez le docteur traitant et le diagnostique ferme. (Pas définitif encore...) J'avoue qu'à la fin, je ne croyais plus que Leyla pût souffrir de quelque chose de grave tant l'attente fût longue. Au pire un virus, au mieux une lubie de son corps pour se rendre intéressant. On fréquente peu les médecins dans la famille, Leyla tombe rarement malade et je ne suis jamais pressée d'aller donner 25€ au docteur pour avoir des anti inflammatoires ou un sirop pour la toux.


Heureusement, dans ce cas précis, le père de Leyla a accéléré les choses. Il est lui-même parano concernant sa santé et celle de ses enfants pour des raisons qui lui sont personnelles (et que je respecte) et même si nous sommes divorcés, un enfant a 2 parents, donc 2 avis sur lesquels il faut compter et son avis l'a emporté. Disons que j'aurai emmené Leyla voir le docteur quelques semaines plus tard que lui, ce qui n'aurait pas changé grand-chose.


J'étais donc debout sur le trottoir à Hauteville devant une bijouterie quand j'ai répondu au téléphone. La 1ère fois que ce numéro avait appelé je l'avais refusé car j'étais en train de parler avec l'amie de mon frère qui tient précisément cette bijouterie et je ne voulais pas couper court à notre conversation. Mais c'est finalement à la faveur de 2 clients entrant dans la boutique que je décrochai. C'était l'hôpital. La secrétaire avait une voix gaie en me disant qu'elle allait me passer le docteur. J'attendais cet appel depuis 2 semaines et je venais de le refuser. A la voix gaie de cette femme, je me dis que les nouvelles devaient être bonnes finalement. Qu'on avait eu tort de se faire du souci et qu'on n'aurait plus qu'à oublier les "si". Mais une autre pensée suivant toujours la précédente comme son ombre me vint à l'esprit et me rappela que ce n'était pas si simple, que même s'il n'y avait rien, il fallait savoir pourquoi ces choses étaient là!


J'eus le docteur rapidement et le reconnu à son accent. Il me demanda comment allait ma fille et si elle se faisait du souci. "Si elle se fait du souci, répondis-je, elle ne le montre pas!"


Et il me dit enfin les résultats : c'était la maladie de Hodgkins. Ils avaient envoyé leurs résultats à Lyon pour avoir un deuxième avis qu'ils venaient de confirmer.


Je n'ai pas eu de coup de bambou ni d'arrêt du coeur. Mes soupçons étaient confirmés, je ressentais un mélange de soulagement et de crainte entrevoyant tout le sérieux de la situation.


Enfin je savais. Nous savions! Et nous allions entrer dans un autre monde bien différent du nôtre.


Pourtant ma première idée, debout dans cette rue passante, justement parce que je me trouvais au centre de la vie, du mouvement, je me dis que la vie continuait et que nous devions continuer avec elle. Ca m'a paru tellement naturel!


Je m'étonnai de mon calme ou plutôt de mon froid détachement en écoutant le docteur dire, avec des mots choisis et compatissants, qu'il faudrait une chimiothérapie pour soigner ça, tout ce que Leyla redoutait! Ce mot passerait mal auprès d'elle.


Egor était près de moi et je lui dis ce qui se passait. A son air grave, je compris qu'il avait compris.


Je réussis à trouver Andy chez lui et à lui annoncer. Il fut bouleversé mais enfin, comme moi, il savait maintenant et on allait pouvoir agir.


Sur le chemin du retour à la maison, je me suis trouvée tiraillée entre 2 choix: tout dire à ma fille dès aujourd'hui ou attendre qu'on soit partis en vacances pour lui avouer. Mais l'idée même qu'elle avait un cancer des ganglions lymphatiques courait dans mon esprit à une allure folle engendrant des suites de pensées graves et désespérées et je me retrouvai seule avec ce secret. Ce secret qui me brûlait les lèvres. Leyla était la première concernée et je ne pouvais lui cacher la vérité plus longtemps. Je la regardai pendant le repas et pris ma décision.


Je l'emmenai dans sa chambre et lui dis tout. Au nom de "chimiothérapie", elle éclata en sanglots comme je l'avais prévu. Je ne pouvais pas craquer, je ne voulais pas craquer devant elle, je devais tenir bon, rester droite et forte pour la soutenir.


Ni elle ni moi ne ressentions de sentiment d'injustice à l'annonce de la maladie. Mais juste : comment la soigner.


Nous l'avons annoncé à mes parents et pour eux aussi, pour les épargner, je me suis demandé s'il fallait tout leur dire tout de suite. Et Leyla m'a conseillé de le faire. Par respect pour eux, pour tout ce qu'ils avaient fait pour les enfants depuis qu'ils sont nés, nous leur devions la vérité! Ma mère n'a pas eu conscience tout de suite de la gravité de la chose mais plusieurs jours après. Et j'ai demandé à mes parents, sur la recommandation de ma fille, restés à la maison pendant notre absence, de répondre aux nombreuses personnes qui demandaient des nouvelles de Leyla, de leur dire la vérité. Elle a horreur des cachotteries. Et puis, mes parents ont besoin de soutien et d'en parler à leurs amis leur a fait du bien.


Comme nous en avions convenu, nous sommes partis en vacances le lendemain.


Delphyne.

mardi 19 juillet 2011

ICE TRAIL TARENTAISE VAL D'ISERE




Raconter ce trail, c'est aussi dire: "j'en suis revenue saine et sauve..."
Pour moi qui traîne assez peu mes bottes sur les trails de Rhône-Alpes, mon expérience se limitait à des courses réalisées le plus souvent par beau temps et où seules mes sensations très personnelles et égocentriques avaient place.
Partie avec le sourire ! Christine Oguey Diaque est devant moi. Elle va faire une montée d'enfer mais je la rattrapperai 2h plus tard.


Rien de tel à Val d'Isère ce dimanche 17 juillet! Arrivée la veille, j'avais en tête la météo assez mauvaise annoncée avec pluie et vent et éventuellement quelques grains de grêle. Et sur un tel parcours, il y avait de quoi se faire du souci quant aux vêtements à emporter; nous devions gravir l'Aiguille Pers à 3400m sur une longue arête et la perspective de se geler au vent m'est venue rapidement à l'esprit. Cela s'est révélé pire que prévu!

Pourtant au moment de partir, le ciel était à peine traversé de nuages, il faisait encore doux. J'étais en manches courtes, short. Dans mon sac à dos, le matos obligatoire que l'organisation préconisait. Malgré une entrée dans l'enclôt de départ avec pointage, j'ai vu des gens avec une simple gourde autour du ventre. De la folie quand on sait quelles seront les conditions 1h30 plus tard!! Un peu de légèreté de la part des organisateurs?

Le départ est donné direction le Manchet. Je ne sais pour quelle raison obscure tenant autant de la dyslexie que de l'écervelée, je croyais que la vallée du Manchet était le chemin de retour... M'en étant rendue compte la veille, j'ai dû revoir tout le parcours sur carte pour le remettre à l'endroit dans ma tête. Plus de 300 concurrents prennent le départ et tous sur le 33km puisqu'en raison de la météo, l'organisateur s'est résolu à annuler le grand parcours passant sur le glacier de la Grande Motte. Sage idée!

Le parcours s'engage donc dans la vallée du Manchet, ascension du col des Fours avec 2 portions raides. Puis descente pour retrouver la route du col de l'Iseran que nous longerons sur 2km. Ensuite de nouveau ascension hors sentier sous l'aiguille des Pers, légère descente à flanc pour rejoindre le col des Pers à 3000m. De là, nous suivrons l'arête qui mène au sommet à 3400m et nous reviendrons sur nos pas jusqu'au col en double sens. Puis descente jusqu'au sommet du col de l'Iseran avec dernier ravito. Dernière ascension du col des Leissières en passant par le tunnel et retour dans la vallée de Val d'Isère par la face de Solaise.

Encouragée par une forme grandissante, ma tactique est de partir assez fort pour ne pas me laisser distancer par les meilleures. Sur le long plat de la vallée tout se passe bien. Mon coeur bat un peu vite et je me résouds à marcher dans les premiers lacets pour calmer tout ça. En revanche, je cours dès que je le peux. La forme n'est pas au top, je dirai 7 sur 10 à cause d'un vendredi passé accroupie à oeuvrer pour la bonne cause. Les jambes sont bonnes mais sans plus. Je suis assez exigeante maintenant! Dans ces cas-là, je me dis que ça peut changer en cours de route et ça changera effectivement!

Le sentier est très agréable jusqu'au refuge des Fours, un peu raide mais sans plus, mon rythme est bon et je passe au col en 1h35 environ. C'est à ce moment-là que la pluie se met à tomber sans discontinuer, drue. Au loin, je vois le 1er ravito, la route du col de l'Iseran et les concurrents qui s'étirent, petits points de couleur dans la brume.

Passage au col de Fours en 1h35

J'arrive bien mouillée au ravito où je bois un coca et mange une banane. Puis j'attaque la portion de route du col en plat bien montant. Ce pourcentage que je n'aurai pas pu faire en courant il y a 2 semaines, je l'avale en trottinant tout en poussant sur mes bâtons, le mollet gauche tire un peu mais le coeur reste bas à 147. Nickel!

Au moment de prendre le chemin dans la montagne, je décide de m'habiller. J'enfile mon sous-pull technique pour conditions chaudes et je repars, ce n'est pas le moment de prendre froid, le parcours est encore long et difficile! Mais la pluie tombe tellement fort que je suis rapidement très mouillée et je commence à avoir froid aux mains. L'effort ne suffit pas à me garder au chaud, l'altitude se fait sentir, j'ai un peu faim, mes jambes alternent entre dynamiques et molles, je fais tout pour rester dans le coup, je bois, je grignote un peu. Le chemin monte dans les rochers érodés par les derniers glaciers sur un parcours balisé hors sentier, très intéressant, technique et réussi! Mais le vent souffle et accroît la sensation de froid. Je m'arrête de nouveau pour mettre mon coupe vent qui se retrouve trempé après quelques minutes. C'est le genre de K-way idéal pour la pêche aux moules en Bretagne... Je regrette soudain les gants et le bonnet sortis du sac et laissés dans la voiture ce matin... Je cache mes mains dans les manches et continue de monter à un bon rythme, il faut se réchauffer!!!

A un moment, le chemin redescend. Nous ne voyons rien dans le brouillard, il faut être très attentif pour suivre le balisage au risque de se perdre... Courir en descente me réchauffe un peu. Secrètement, j'espère qu'ils ne nous feront pas monter à l'Aiguille car j'ai peur de ne pas y arriver dans mon état. Mais au col des Pers, les gars me disent qu'on peut monter... Ok, allons-y. A ce moment-là, je vois des concurrents descendre en courant à l'aise, à leur allure, ils semblent être dans le peloton de tête. S'ils n'en sont que là, me dis-je, combien de temps vais-je mettre pour arriver en haut, dans ce vent, ce froid, cette pluie qui giffle??? (Je mettrai 30min pour aller du col au sommet, 3h34 depuis le début)

Et des idées me viennent en vrac à l'esprit : "arrête-toi!" ce à quoi je me réponds :"JAMAIS !"

"Ok, me dit le petit diablotin de mon esprit sur un ton goguenard, dans ce cas, ne te plains pas d'avoir froid!!" Et c'est vrai qu'il ne faut pas se plaindre. Se plaindre, gémir c'est subir les conditions extrêmes et c'est la porte ouverte à l'abandon. Et là, dans cette montagne abrupte, avec des rafales violentes de vent, la pluie qui cingle le visage, qui ruisselle au point de me mouiller entièrement jusqu'au slip, avec des grains de grêle qui fouettent les jambes, le visage qui se crispe, le rictus pour supporter le froid, il n'est pas question d'arrêter. Pour aller où? Personne n'est capable de me donner des vêtements chauds et secs, personne n'est capable de m'aider, s'arrêter c'est l'hypothermie assurée, c'est mourir, pensé-je en moi-même.





La descente du col des Fours où il fait encore bon. Après cela, impossible de prendre des photos : mains gelées!
Et c'est à partir de maintenant que la course prend une tournure différente pour moi et certainement pour beaucoup d'autres aussi. La brochure du trail disait : "Vous avez les jambes... mais aurez-vous le mental?" Ah Ah Ah... Je n'ai pas la force de ricanner, juste de mettre mes mains au chaud sous les aisselles, d'avancer un pied devant l'autre et d'arrêter de me dire qu'il fait froid. Le mental entre en effet en action sous la forme de l'instinct de survie. Comme je le disais plus haut, s'arrêter (abandonner) c'est mourir (j'exagère à peine) ou souffrir terriblement. Quitte à souffrir, autant le faire en bougeant, toujours, en avançant et en serrant les dents. L'altitude est encore plus aigüe à supporter pour les muscles, quand je lève le nez, la tête me tourne terriblement et je vacille. Le vent souffle en rafales violentes, il pleut très fort et parfois je sens quelques grains de grêle me fouetter les oreilles. J'arrête de me servir de mes bâtons car mes mains gèlent sur les poignées et je monte finalement mieux sans. François revient sur moi de l'arrière après quelques problèmes gastriques et me confirme qu'aucune autre femme ne me menace en revenant. Je suis contente de le revoir, je me faisais du souci en pensant qu'il s'était peut-être fait mal quelque part. Je lui demande de me donner un Sporténine et n'ayant pas la force de le prendre dans mes doigts gourds, il me le donne à la becquée comme à un bébé. Ca me fait du bien mais il faut quand même lutter contre le froid. Le vent c'est une chose mais quand on est trempé, c'en est une autre. Je ne pense plus à ma performance, seul l'objectif de rester au chaud me pousse à marcher vite. Les concurrents que nous croisons et qui reviennent du sommet nous disent qu'il y a encore un bout avant d'y arriver... Ne pas y penser, avancer, avancer. Eviter les chutes sur les plaques de neige glacée en dévers, ne pas trébucher quand il y a le précipice juste à côté, garder les mains serrées contre soi car le moindre écart fait entrer l'air glacé et croyez-moi ce sont des gestes vitaux!

Enfin nous arrivons au sommet et je n'ai pas envie de crier victoire, seulement de me dire: "enfin!" Là nous trouvons 3 volontaires bien habillés mais dont je n'envie pas la place! Rester planté plusieurs heures dans cette tempête, c'est presque plus inhumain que notre ascension! J'échange quelques mots avec eux en plaisantant (je ne peux pas m'en empêcher) je regarde mon équipier et je m'aperçois qu'il est en bien mauvaise posture: ayant oublié son coupe-vent, malgré un bonnet et des gants, il est en hypothermie. Je l'encourage alors en lui disant que le plus dur est fait et que nous allons vite partir d'ici. Désormais notre objectif est de fuir cet enfer le plus vite possible! Je ne rêve que d'une douche chaude et de vêtements secs!

En redescendant j'encourage aussi tous les gens que je croise et qui en bavent autant que nous, ils ont tous le rictus du froid sur le visage. Et le fait d'encourager, d'aider les autres par la parole me fait oublier mes propres difficultés. Et je me sens pousser soudain des ailes, ma voix porte haute et claire dans l'air froid, mes muscles durcit par le froid sont insensibles et je peux donc attaquer en descente sans ressentir de douleur. Je suis encore loin de l'hypothermie car j'ai une couche adipeuse certaine! Mais d'autres n'ont pas cette chance... Au col j'étais 5ème dame et je vois 2 femmes abandonner dans la descente pour hypothermie, j'en double une autre et je me retrouve finalement seconde de retour au col. Seconde! Qui l'eût cru? Raison de plus pour voler de plus belle en dévalant la pente! Les 2 bouchées de barres que je mâche ont du mal à passer. Je double un certain nombre d'hommes et je continue sur mon rythme, rien ne peut m'arrêter. François me suit de loin mais il est toujours là.

Je pense à ma soeur, à son accueil chaleureux la veille et au petit mot laissé sur la table que j'ai emporté dans mon sac et qui dit ceci: "MERDE pour la course. Et YALAA pour la victoire!!" Oui, Yalaa !! Je fonce tout en pensant aux mots d'encouragements de mes proches et ça me porte.

J'arrive au col de l'Iseran où la soupe chaude à laquelle je pense depuis un quart d'heure me brûle la gorge. Quel délice!!! C'est déjà ça et c'est tellement! Les bénévoles nous encouragent avec chaleur. François tremble tellement qu'il renverse la soupe sur ses gants. Il se questionne encore à savoir s'il abandonne ou non. Puis, le brouillard se déchire et on aperçoit le haut du col des Leissières tout proche. Réchauffé par la soupe, il se décide pour continuer et nous y allons.

Je crie de joie en voyant que ce col est minable par rapport à ce que nous venons de gravir! Je crie de joie dans la montagne en disant que c'est bientôt la fin et qu'on va pouvoir se doucher!! Et nous grimpons à l'assaut de la pente dans les gravats d'ardoise. Arrivée au tunnel en 20min, je serre le bras de François en le félicitant de son courage pour s'être accroché jusque là. Ceux qui le traversent avec nous ont les mêmes mots.

Nous débouchons sur la vallée de Val d'Isère et il reste la descente finale, plus de 1000m de dénivellé sur un parcours mi-sentier, mi hors piste montagnard et sauvage, magnifique! Nous gagnons quelques degrés à mesure que nous perdons de l'altitude et ça va très vite mieux.

Je m'applique à adopter la technique de descente que j'ai vue chez un autre concurrent en montagne et cela va vite. Vite sans faire mal. Nous doublons encore des concurrents. En fait, certains ne sont pas montés à l'aiguille des Pers et ont préféré éviter l'enfer. C'est pourquoi je double des femmes mais qui ne sont en fait pas devant moi au scratch. Dans la pelouse alpine, nous marchons sur des joubarbes, des raiponses, des pieds de chat, l'herbe est très verte, adorable. Il pleut toujours, le brouillard noie le paysage et nous attaquons enfin la face de Solaise sur la piste de VTT. Plus nous descendons, plus c'est boueux. A un moment, je veux franchir un pont de bois et au moment où mon pied va se poser, je me dis "Mais... un pont de bois mouillé, ça glisse..." et vlam, je me rétame à plat ventre! Pas de mal, on rigole!

La brume se déchire juste au moment où nous arrivons à la station, le dernier sentier dans la forêt de mélèzes est hyper glissant puis c'est l'arrivée où nous nous donnons la main pour sceller une course difficile où nous avons eu besoin de mobiliser d'autres choses que notre seule force physique.



L'arrivée main dans la main

5h24 pour 33km. Les forces vitales et mentales ont été plus que nécessaires, nous avons développé l'aspect psychologique non pour aller plus vite mais pour continuer à avancer afin de ralier l'arrivée, la sécurité, la chaleur plus vite. Certains n'ont pas pu le faire, soit par manque de matériel adapté, soit parce qu'ils ont craqué. Je compatis.

Et la douche a été excellente! Quel bonheur! Dans le plus grand parc aquatique des Alpes! J'ai échangé mes impressions avec d'autres coureurs qui partageaient mon avis : là haut, c'était l'enfer!

Nous avons attendu un certain moment pour la remise des prix car du fait que certains n'étaient pas montés tout en haut et que les pointages avaient été un peu légers, le classement était faux. Pas pour les 30 premiers mais pour les autres. J'en connais certains qui ont été "volé" de leur victoire. Je termine finalement 2ème, une place que j'apprécie à sa juste valeur et que je n'aurai jamais espérée. La 1ère Virginie Gauvignond est en 5h14 et la 3ème Christine Oguey Diaque termine en 5h45.

J'ai été très gâtée par les organisateurs grâce à ma seconde place au scratch et ma 1ère place en V1 : un collant 3/4, 2 paires de chaussettes, un tee-shirt technique BIONIC, 1 kilo de Beaufort et 1 forfait journée sur le domaine. Génial!

Chez les hommes c'est l'excellent, talentueux et très sympathique Damien Vouillamoz qui s'impose en 3h32 !! Il nous a raconté sa course : il n'a pas eu froid sur le sommet des Pers (merci sponsor!) grâce à ses bons vêtements mais il a souffert d'un coup de pompe au tunnel où Alexis Traub l'a rejoint. Ils ont fait la descente ensemble et Damien le devance de 42 petites secondes! A la régulière! Le 3ème Clovis Dalban Moreynas pointe à 12min.



De d à g : Christine, Virginie et moi.


Je remercie l'organisation de l'ITT pour sa générosité et sa sympathie, les bénévoles pour leur courage, Pascal Pierrain alias Photogone pour son aimable accord sur les photos et j'espère être là l'an prochain pour la seconde édition. C'est une très belle course qui mérite son appellation de plus haut trail d'Europe et c'est en cela qu'elle est attirante!


Ar'vi pa!

lundi 27 juin 2011

MONT BLANC MARATHON




Raconter une énième course n'est pas si intéressant pour moi si je ne donne pas la tendance, l'atmosphère, l'ambiance qui l'a précédée.


Venue déjà 3 fois sur le cross du Mont Blanc depuis 2008 et après une expérience agréable en marathon trail en Ubaye en août 2010, je m'étais inscrite pour la course de Chamonix en septembre 2010, sûre de cette façon d'avoir un dossard! Et obligée de me préparer pour le faire!!


En vue de cette belle course, je me suis donc préparée un peu plus sérieusement que les années précédentes. Ce qui signifie que j'ai fait plus de sorties longues (+ 2h), plus d'endurance et que je l'ai bien supportée. Des sorties longues et du dénivelé bien-sûr. Le trail du Gypaëte (30km) m'a permis de faire une bonne préparation début juin. Et seulement quelques séances d'intensité pour peaufiner la forme : 1 séance de seuil et 2 de VMA. Pas de quoi fouetter un chat mais bien suffisant à mon goût. Le tout étant de ne pas tomber dans l'excès de fractionné. Rien ne m'énerve plus que ces dossiers "entrainement clé en main" fleurissant dans tous les magazines de running où les intensités tiennent, à mon avis, beaucoup trop de place. Il faut bien se rendre compte que la plupart des gens se mettant à la course à pied n'ont absolument aucune notion de physiologie du sport et ce ne sont pas ces articles qui viendront combler leurs lacunes.


La base de tout c'est l'endurance fondamentale 1. Pour 90% de l'activité. Et pour les 10% qui restent, ce sont les courses et les séances spécifiques d'intensités. Point barre. Et dans mon programme d'entrainement de cette année, c'est ce rapport qu'on y trouve. Mes semaines totalisent entre 4h et 10h, le dénivellé de 1200m à 2500m par semaine, voilà pour les détails.


Comme je suis une petite cylindrée, j'ai besoin de qualité. J'ai donc réussi à faire les séances longues sans me fatiguer ni le corps ni l'esprit mais en étant certaine toutefois qu'elles soient très efficaces pour ce que j'en attendais.


Samedi en début de soirée, me voilà à Chamonix par un temps superbe. Le cross vient d'avoir lieu, la première dame espagnole a fait un temps magnifique et elle promet cette jeunette! Mais je déplore qu'il y ait si peu de femmes au départ de cette épreuve! En 2008, il y en avait plus!


Mon souci pour le moment est de trouver une paire de bâtons car j'ai oublié les miens et il n'est pas question de faire ce marathon sans bâtons, en bonne fondeuse que je suis! J'entre dans le 1er magasin que je trouve, chez Sanglard... excusez du peu et je prends ce que la dame me propose, des bâtons en alu de ski alpin... Je ne vais pas faire la difficile en plus!


Ensuite, direction le centre sportif pour retirer le dossard. Une fois ces formalités accomplies, je peux profiter de ma soirée toute seule!! Chamonix c'est MA vallée parce que j'y suis née et qu'en tant que Chamoniarde native, je garde une nostalgie et une fierté d'être née ici.


Je loge à l'hôtel "des randonneurs" à Argentière. Les années précédentes, je dormais sous la tente mais cette année j'avais envie de mon petit confort... Il propose, et ce doit être les seuls de la région, la nuit à 15€ en dortoir! Ils ont même avancé l'heure du petit-déjeûner pour les coureurs du marathon à 5h15. Très sympa! Ensuite je vais manger en ville. Cet hiver, j'ai gagné une course régionale de ski de fond à Vallorcine et comme récompense, j'ai gagné une veste polaire et diverses petites choses qui m'ont fait plaisir dont un bon gratuit pour manger dans un resto du coin. C'est un super resto où je vais déguster un hamburger maison garni de confiture d'oignons absolument délicieux et des pommes sautées à l'ail encore plus sublimes! Pour accompagner le tout, un demi de bière et la conversation intéressante et charmante d'un autre client single assis à côté de moi.


Couchée à 22h, le sac est prêt, je m'endors sans penser au lendemain.


Le problème des dortoirs c'est qu'il y a toujours des gens pour se lever avant vous et faire du bruit. Quel intérêt de prendre sa douche à 4h30? Bref... Je ne suis pas à la bourre comme l'an dernier et j'ai le temps de m'échauffer un peu avant de partir. Je suis la seule à le faire dans les rues! Tout le monde semble vouloir s'économiser...


Il y a un monde fou sur la place Balmat et j'attends mon accompagnant, François, qui a voulu faire cette course avec moi pour en faire le récit ensuite dans Trail endurance mag. Quand il m'a proposé ce projet, j'ai d'abord hésité car je me disais qu'étant coureuse lambda de niveau très moyen, je n'étais peut-être pas la mieux placée pour témoigner. Puis j'ai posé mes conditions : qu'il ne me colle pas trop sur la course car j'ai du mal à supporter quelqu'un dans les pattes pendant 6 heures et que je donne mon aval pour les photos. Une fois les règles établies, j'ai accepté. On a fait le trail du Gypaëte par équipe de 2, quelques séances d'entrainements dans le Colombier. Mais je veux rassurer tout le monde : je suis quelqu'un de très moyen avec certes un passé de sportive de haut niveau mais tout ça est très très loin! En course à pied, je n'ai ni le profil d'une pro ni les ambitions. Je ne demande qu'à me faire plaisir comme je l'ai toujours fait pendant toute ma vie!


On s'est donné rendez-vous à 6h45 au pied de la statue mais personne en vue! A 6h50 je vais me placer dans la foule du départ mais je suis déjà loin derrière. Et je ne me doute pas que je fais une grosse erreur... J'aurai dû me faufiler le plus loin possible devant, on verra pourquoi plus loin.


Je prends une photo au départ, je suis sereine, j'ai une confiance totale en mes capacités, je sais comment gérer ma course et je rêve de faire moins de 6h. L'ambiance est folle, on danse sur les Black Eyed Peas et le départ est donné! Je vais mettre 2 minutes pour arriver jusque sous la banderole du départ... Ensuite nous partons en petites foulées dans les rues très fraîches de la ville où beaucoup de monde nous applaudit. J'ai les mains froides mais cette fraîcheur est agréable en prévision de ce qui nous attend dans 4 heures en plein soleil, juste au dessus! J'ai vu des gens avec le même genre de bâtons que moi, je me sens moins bête... Pourtant, malgré la difficulté du parcours, moins de la moitié des concurrents emporte des bâtons, sans doute parce qu'ils ne savent pas s'en servir. Ce n'est pas une critique, c'est juste qu'une paire de bâtons pèse lourd et que ça représente aussi une dépense énergétique supplémentaire. Mais certains préfèrent sans.


Côté machinerie, les jambes tournent bien, le coeur est ok, pas de sensations de jambes lourdes ou de muscles saturés d'acide. Les 10 premiers kilomètres sont faciles et vallonnés puis on entame une petite montée vers le col des Montets, on redescend sur Vallorcine jusqu'à la frontière suisse dans le trou. Et à partir de là commence l'ascension du col des Posettes, 1000m de dénivelé, raide au début puis sur des pistes de ski sur la seconde moitié. Au col, un joli sentier dans les alpages mène à l'aiguille des Posettes, point le plus haut de la compétition. Ensuite, on redescend aussi sec ce qu'on vient de monter avant de reprendre le chemin qu'emprunte le cross du samedi. Et la dernière partie slalome entre les pins et les mélèzes sur le versant ouest, quitte la forêt sous la Flégère, le chemin monte alors droit dans la pente "dré dans le pentu" comme on dit par là et mène au télécabine de la Flégère. Dernier ravito et les cinq derniers kilomètres se déroulent sur un sentier "single track" avec moults rochers à enjamber et c'est bien ça le plus difficile, éviter les chutes quand on a les forces qui déclinent. Et pour finir en beauté le dernier mur, 1km très raide avec des cailloux qui roulent sous les pieds à la fin, les muscles qui brûlent et la fabuleuse sensation de soulagement quand les jambes franchissent la ligne d'arrivée!


Côté stratégie, j'ai prévu de partir à la même allure que l'an dernier c'est à dire tranquillement sans faire monter le coeur et de passer dans les 1h30 à Tré le Champ. Si je veux pouvoir franchir la ligne d'arrivée en moins de 6h, c'est le plan de marche qu'il faut respecter. Mais très vite, je vais me rendre compte de mon erreur du départ. Partie dans la foule, je vais rester avec la foule longtemps et subir les désagréments que cela engendre: ralentissements dans les passages étroits, arrêt de plusieurs minutes parfois, de quoi trépigner d'impatience! Et me faire perdre du temps. Alors oui, on est tous dans le même train mais ça fait ch... quand même! Du coup, je passe en retard à Tré le Champ mais j'arrive dans les temps à Vallorcine : 2h09. Ce sera la seule fois de la course où je suis dans mes temps. Mais ça me redonne le moral. Pour arriver jusque là, je suis passée sur les pistes où j'ai gagné cet hiver. J'ai aussi absorbé une topette de Punch Power en vue de la 1ère difficulté : le col des Posettes. Au ravito au pied du col, je mange de la tomme sur du pain et je manque m'étouffer. Je bois beaucoup de boisson énergétique, je me passe le visage à l'eau froide. Le soleil n'est pas encore là, la rosée perle sur les pelouses, un orchestre de percussions nous accompagne à la sortie du village et hop à droite, la montée commence. Et je manque de m'étrangler : ça fait encore des bouchons, on monte à une allure de tortue en file indienne, je sens que les concurrents ont peur de ces 1000m de dénivelé et y vont doucement. Pas moi. Je prends la résolution de doubler le plus possible. Ca me prend de l'énergie car il faut plus souvent grimper sur les rebords du chemin, enjamber les cailloux, s'excuser de demander pardon, ne pas bousculer les concurrents dépassés, être obligé à certains endroits de suivre le rythme minimal et ça m'agace. Mais tant que le chemin monte raide, on avale plus rapidement les courbes de niveau. Puis, à mi pente, on débouche sur les pistes de ski et c'est dans cette partie que je vais perdre du temps. Ce n'est ni raide ni plat, une sorte de faux plat à la con où je ne peux pas courir tout le temps et où j'ai l'impression de faire du sur-place en marchant. Ce col finalement pas si dur que ça, je vais le gravir trop lentement, en 1 heure (sur la courbe de mon cardio Suunto, il est nettement établi que je n'étais pas dans la plus rapide allure) et quand je débouche au col, j'ai plus de 20min de retard sur le plan de marche. Et c'est ce plan qui me permet de rester motivée, de toujours avancer plus vite, d'avoir ce moteur pour objectif et d'éviter les passages en roue libre. Toujours rester sur le fil, ne pas me relâcher. Heureusement, la vue éblouissante m'apaise un peu: le glacier d'Argentière, l'aiguille du même nom, l'aiguille verte, le ciel pur et bleu, le soleil déjà écrasant et un chanteur à la guitare qui nous remonte le moral en interprétant (très bien) les standards rock : Johnny, Joan Jet, Queen...









On boit comme si on avait soif!



Quelques verres d'eau, une topette pour éviter les crampes en vue de la prochaine (et seule) descente et me voilà repartie. Et là, je n'y crois plus. Je pensais mettre un coup de collier jusqu'au sommet de l'aiguille mais c'est encore pire que dans la montée : ça monte à la file indienne tout doucement, mon fils de 7 ans irait plus vite, j'en suis sûre! C'est trop agaçant, je trépigne d'énervement quand je ne peux pas passer, de nouveau il faut enjamber les rochers sur le côté, demander pardon, gna gna gna... J'évite de trop couper les virages car il y a toujours des imbéciles pour s'en plaindre, pour le temps que ça me ferait gagner... Bref, vous l'avez deviné, je suis grognon contre l'allure d'escargot et surtout contre moi-même car c'est ma seule faute de m'être placée si loin sur la ligne de départ... Je n'imaginais pas les conséquences que ça pourrait avoir sur ma petite performance. Quand on veut faire un temps sur une course, il faut mettre tous les atouts de son côté !



Enfin, enfin! La descente est là et je tiens à ne pas me laisser ralentir cette fois. Je peux m'appuyer sur mes bâtons quand je saute, quand je franchis des rochers mal équilibrés, ça amortit et ça me fait moins mal aux muscles, aux genoux, leur aide est très conséquente. Suivie d'une autre concurente, nous faisons une bonne descente et doublons beaucoup de monde. C'est à partir de ce moment que je vais avoir cela en tête : doubler le plus de monde possible. Ca me rappelle mon premier cross ici en 2008 quand nous nous étions trompés d'itinéraire et qu'en retrouvant le chemin en dernière position, j'avais dû remonter presque 500 personnes! J'ai tout vécu sur ces épreuves : la bonne forme, l'erreur d'aiguillage, la craquante. Ca forge le caractère.



Dans la descente, nous échangeons quelques mots avec cette femme et je blêmis quand elle me dit qu'elle est en retard sur ses temps de 2010 quand elle avait fait 6h57... (Cette année, elle mettra 6h54!) Je n'ose pas lui dire ce que j'envisageais pour moi... Cette fois, pas d'erreur possible, je suis sérieusement en retard sur mon plan et ça me contrarie beaucoup. Plus question de se laisser aller. Même si je ne me suis guère laissée aller depuis le début.


La descente se fait rapidement grâce à des marches d'escaliers grossières qui nous font perdre de l'altitude, j'ai mis 30min environ pour dévaler les 1000m. Mais je ne suis pas dans la meilleure humeur quand tout à coup je retrouve François au passage du Tour. Il m'explique ses déboires avec force gestes et excuses : n'ayant pas pu monter la veille comme prévu, il a crevé sur l'autoroute ce matin et est arrivé à la bourre au départ, d'où notre rendez-vous manqué. Mais il a été plus malin en allant se placer au départ avec les meilleurs. J'aurai bien aimé avoir ce conseil... Quand je le retrouve, je ne pensais plus du tout le revoir un jour sur cette course! Je suis concentrée sur ma déception de savoir que je ferai pas ma course en 6h et sur le fait que je dois m'accrocher et continuer malgré tout à accélérer et à remonter le plus de monde possible. Quand j'ai une femme en ligne de mire, je mets un point d'honneur à la doubler. Du coup, l'irruption de François dans ma course me déconcerte, surtout qu'il me parle d'autres choses que ce qui me turlupine à l'instant. Je lui parle un peu de mon parcours jusqu'à présent, après tout il est là pour écouter ça... Mais je limite les échanges, je veux rester concentrée sur mon effort. En tout cas, pour le reste de la course, il respectera le fait de rester discret derrière moi et en échange, je lèverai la tête quand il me prendra en photo...


Mais me voilà à Tré le Champ pour l'ultime gros ravitaillement. J'en suis à 4h35 de course. L'an dernier, j'avais mis 1h35 d'ici pour ralier l'arrivée mais je n'avais pas ce détour de 2h par les Posettes dans les pattes. Pourtant je vais tout faire pour finir le plus vite possible. Même si je sais que je ne peux pas le faire rien qu'à cause de la fatigue déjà accumulée, j'ai envie de croire que cet impossible est possible. J'avale 3 verres de boisson, 2 verres d'eau, une banane, une barre de céréales au chocolat et je repars.


Mais je me sens comme après un gros repas de famille le dimanche après-midi à 16h, l'estomac lourd, les jambes en coton. Je décide alors de laisser passer ce moment de faiblesse en marchant à allure modérée, le temps que l'estomac fasse son travail et que l'organisme se mette de nouveau à alimenter le diesel en carburant! C'est à ce moment que François me dit que j'ai une bonne allure. C'est vexant! Je dirai plutôt que je me traîne. Juste après, il m'encourage en disant la phrase qui tue:"Allez, on y croit!". Je l'arrête net en lui conseillant toute autre expression sauf celle-ci. Bien-sûr que j'y crois! Si je n'y croyais pas, je ne serai pas là, non? Je sais, je suis chiante mais c'est encore pire quand je suis en plein effort! Heureusement François se montre compréhensif et patient...




La montée sous la Flégère avec les Drus et l'aiguille Verte en fond d'écran... Fantastique!

Et cette portion écrasée de chaleur dans la forêt avant d'arriver aux Chézery me parait très longue. J'attends la montée vers la Flégère avec impatience, j'ai hâte d'en découdre avec cette dernière partie! Je tète un petit coup au camel back et m'y voici enfin. Je ne sais pas pourquoi mais il y avait deux endroits de la course qui m'attiraient: cette montée avant la Flégère et les 5 km qui suivent. Peut-être parce que je les connais mieux et parce qu'ils représentent surtout des défis véritables à relever. Tout en montant à bonne allure, j'apprécie d'avoir l'aide de mes bâtons car s'il y a bien un endroit où ils me sont d'une aide précieuse, c'est là, en plein cagnard, sur ce chemin raide et interminable où je vois un serpent de concurents devant moi que je vais dépasser, c'est sûr!! Effectivement je double beaucoup de monde dont des concurrents affalés par terre victimes de crampes, d'un coup de barre, d'un départ trop rapide. J'encourage certains car je sais ce que c'est ! Ce sont des moments de grande souffrance, de grande solitude où on se retrouve face à soi-même, à ses propres erreurs qui nous ont conduit là et après lesquelles on ne peut que subir et attendre que ça passe. En se jurant de ne jamais recommencer !


La Flégère se dresse fièrement et nous offre le dernier ravito du marathon. Là bas, à 5km, on voit déjà l'arrivée... Je retrouve au poste de secours une concurrente plus âgée que moi qui m'avait doublé dans l'ascension des Posettes, je m'étais dit en la voyant qu'elle pouvait être fière de sa performance. J'aimerai moi aussi pouvoir encore courir pour le plaisir dans 10 ou 15 ans et j'ai conscience qu'il faut, pour ça, apprendre à économiser la machine. Je ne suis pas du genre à brûler mes vaisseaux pour des honneurs immédiats et l'enfer à moyen terme. Les succès, je les ai eus quand il le fallait et aujourd'hui, si je ne performe pas, ce n'est pas la fin du monde. Je ne regrette jamais rien, j'analyse plutôt les erreurs lucidement, j'accepte ce que mon corps veut bien me donner dans l'effort mais j'avoue que quand il faudrait se dépouiller pour une dernière ligne droite et s'écrouler d'épuisement à l'arrivée, je préfère finir vite sans excès et sans creuser un vide en moi. J'ai déjà donné dans le genre, je ne cours plus pour ma carrière ni pour une équipe. Je cours pour moi seule et je ne rends de compte qu'à Delphyne. On s'arrange en douce....


J'en suis à 5h45... Les 6h me narguent mais je ne les aurai pas! Je bois 2 verres de boisson et je ne traîne pas dans les parages. Je déplie les jambes en trottinant sur le sentier et tout à coup, sans que je sache d'où ça vient, je me mets à courir comme une dératée. J'aime ces sentiers où il faut viser juste quand on pose le pied sur un petit rocher, évaluer le point d'équilibre, anticiper l'endroit où je pourrai doubler sans me faire mal, aller vite et se laisser griser. J'ai une force incroyable qui me pousse à courir sans que j'éprouve la moindre fatigue dans les jambes, j'ai le coeur à allure VMA (161 pour moi) et si je peux faire ça c'est qu'il me reste suffisamment d'énergie, j'ai bien géré ma course. Je ne réfléchis plus, je dis "gauche, gauche!" aux concurrents que je double pour éviter les frottements, il y a 3 ou 4 gars qui m'ont emboîté le pas et qui profitent de mon sillage, ça me pousse à continuer. Moi qui avait peur de craquer à cet endroit, peur de ne pas pouvoir courir, c'est le contraire. C'est là que mon passé et mes acquis de sportive de haut niveau ressortent, pour peu que je les entretiennent, ils me sont très utiles, tant physiquement que mentalement.


En revanche, dès qu'il faut marcher dans certaines montées, ça tire et ça fait mal. Mais l'arrivée se profile, une dernière petite bosse qui débouche sur une ultime descente avant l'ascension finale. Je me déporte dans les rhododendrons à gauche pour doubler une file de concurrents, certains ne veulent pas se pousser, c'est très agaçant, surtout quand ils voient que c'est une fille... Je reste polie alors qu'un type me reproche de le pousser et j'ai des noms d'oiseaux qui me viennent à l'esprit s'il insiste. Il y a la fatigue, l'énervement, la chaleur, je comprends mais tout de même, ils doivent prendre conscience que ceux qui doublent ont certes une meilleure forme mais doivent aussi faire des efforts supplémentaires et prendre aussi des risques pour éviter de les bousculer. L'odeur sucrée des résineux disparaît alors que j'aborde le dernier mur.


Ce n'est pas la peine de se dire d'y aller franco, la pente aurait raison de ma volonté, de mes muscles très rapidement. Mieux vaut monter à une allure régulière et réserver le finish pour le public nombreux tout en haut. C'est vraiment dur, il fait chaud, j'ai mal à la tête, les lèvres sèches, le souffle court et comme tous ceux juste avant moi : je m'accroche!


Au pied de la côte, il y a une américaine qui encourage les coureurs comme si sa vie en dépendait, comme si on lui avait dit qu'elle recevrait une balle en pleine tête si elle se taisait, elle encourage comme une américaine quoi! De loin, ça me porte sur les nerfs. Puis je me laisse bercer par ses cris d'encouragements et la remercie d'un "thank you" quand je passe à ses côtés, trop heureuse de m'être laissée porter par le son de sa voix. Ce sont des encouragements sincères finalement, généreux qui me touchent beaucoup. Et il y en a eu tellement tout au long de cette épreuve, j'ai remercié les gens du mieux que je pouvais d'un mot ou d'un hochement de tête. Ils ont donné de la voix pendant des heures, ils ne courent pas mais ils savent et ils nous supportent en nous encourageant chaleureusement. C'est formidable et je tiens à les remercier encore tous, du fond du coeur!!


François passe devant pour prendre des photos à l'arrivée, une fille me double en trombe, impossible de la suivre et je grimpe enfin ce dernier raidard sous les applaudissements des spectateurs avec la perspective d'une bonne bière fraîche à l'arrivée!
Voilà, 6h34! Je suis loin de mon objectif, je sais pourquoi et il n'y a rien à ajouter. Je termine ce fantastique marathon dans un bon état physique, mes chaussures ASICS m'ont portée de façon royale, je n'ai pas eu de coup de barre, j'ai senti un peu l'altitude à 2600m, je regarde l'objectif de François, heureuse d'avoir franchi la ligne avec le sourire.


Nous buvons une bière de concert, ça fait un bien fou!


En regardant les temps de passage après coup, il s'avère que j'ai fait une remontée incroyable depuis le 23ème kilomètre, doublant 216 concurrents et 14 dames. Je me classe 11ème V1 et 42ème dame. La première dame Stéphanie Jimenez est en 4h39, devançant la très sympathique Lisel Dissler en 4h47.


Sur mon 1er marathon trail en Ubaye, j'avais mis 6h11 sur un parcours avec autant de déniv positif que négatif. Et je n'étais pas en aussi bonne forme. Je pense que j'ai progressé un peu.


Au lendemain de l'épreuve, je suis partie faire 1h30 de vélo au plat, vraiment tranquille pour faire tourner les jambes, rien de tel pour la récupération. Quelques siestes et je pourrai bientôt reprendre les sorties à pied. Je ne me force pas, j'ai besoin de récupérer et de décompresser avant le mois de juillet, qui, professionnellement, sera très chargé. Peut-être que vous me verrez à l'ITT à Val d'Isère. Une petite distance, ça me tente (32km) mais ma présence là-bas dépend de beaucoup de choses, j'en saurai plus la semaine prochaine! Et grand repos en août. Ensuite, pas la peine d'y penser, c'est trop loin!


Ar'vi!


P.S: et pour les photos, impossible de sortir les miennes de l'appareil, j'ai donc dû "emprunter" celles de François. Désolée!






















mercredi 22 juin 2011

LE LIEN






LES DRAPS BLANCS


"Quel est ce lien qui nous tient vivant dans ce monde?..." chantait Grégory Lemarchal. Il faisait allusion à l'amour mais dans notre belle vallée du Valromey (oui la plus belle, soyons chauvin!) il s'agit de l'Amitié.

















"Nouer des liens, créer des liens". Voici le leitmotiv de Bertrand Guyot, habitant sur la commune de Songieu. Son idée a germé il y a à peine un an et s'est concrétisée grâce à son optimisme, sa bonne humeur, son énergie incroyable et son opiniâtreté.


Les "déchireuses"...


L'idée?


Rassembler les vieux draps blancs qui encombrent nos greniers et nos placards, les découper en bandes de 10cm, les nouer entre elles et en faire une oeuvre d'art collective et éphémère. Nouer les liens des draps et créer des liens entre les participants. Opération réussie!


Où?


Les séances de découpage-nouage se font dans différents endroits du Valromey prompts à accueillir de joyeux énergumènes armés de ciseaux et l'oeuvre d'art sera élaborée sur le site mythique de Chateauneuf, (commune de Songieu) sur des ruines très peu restaurées mais dans un endroit magnfique.


Combien?


Ce sont plus de 400 personnes qui ont participé à cette oeuvre collective qui mérite son nom! Ecoles, maisons de retraite, foyer CAT handicapés, privés, restaurants, centre de loisirs, Communauté de Commune, mairies et j'en oublie ! Un budget également défendu par Bertrand auprès des partenaires locaux afin de ramener quelques fonds dans le but de sécuriser le site avant de recevoir le public. De ce fait, une belle barrière en bois a été construite devant la falaise et sur le belvédère. Ce sont aussi près de 37km de bandes de draps mis bout à bout qui ont été amenés sur le site en vue de créer les oeuvres.


L'opération du comptage en km.


Et des centaines d'heures de travail de la part de tous pour rassembler, découper, nouer, entasser, démêler(...), coudre, assembler, construire, élaguer, monter, créer, façonner, rectifier, gonfler et... admirer !!!


J'ai participé à 2 soirées de découpage-nouage. J'avoue qu'au début je me demandais bien ce que voulait dire cette histoire de liens, ce que ça allait donner. Encore une lubie d'illuminé? Puis mes parents m'ont dit, à l'issue de la première séance au restaurant le Coq'ain à Hotonnes, qu'il y avait une ambiance du tonnerre, qu'ils s'étaient bien amusés avec des amis et des gens avec qui ils avaient fait connaissance et que je devrais venir voir, pour voir...


Ok, rendez-vous était pris pour la seconde séance aux Plans d'Hotonnes chez Lise Dalin, au Bon Plan avec apéro, petite restauration avant le travail. Il y avait pas loin d'une 40aine de participants, jeunes et moins jeunes et je peux dire que l'ambiance y a été très festive et détendue. M'étant habillée de noir, je regrettai rapidement mon idée... Il faut dire que quand on découpe des milliers de bandes de draps, une fine poussière de coton plane dans l'air, s'accroche aux vêtements, irrite et assèche les gosiers, se dépose sur tout le mobilier en moutons légers.


Il y a ceux qui découpent, ceux qui nouent et chez ces derniers, on retrouvait des spécialistes venus pour battre les records! Autour d'eux s'entassaient des tas de bandes nouées qu'il fallait prendre garde à ne pas mélanger au risque de se retrouver avec une énorme boule de noeuds à défaire. Bertrand et sa femme Géraldine s'occupaient de mesurer la longueur et annonçaient en fin de soirée :"6.5km!" ou "7.3km!" et on s'extasiait tout autant qu'on se demandait si la distance voulue de 40km serait atteinte à temps! Bertrand "l'apache" pendant une soirée!




A BOULETS BLANCS


Pendant ces soirées, j'ai effectivement noué des contacts avec les inconnus présents, discuté avec les forces en présence et ce projet a effectivement atteint son but de resserrer les liens entre habitants du Valromey, gens de passages et volontaires enthousiastes.


Ensuite, suivant les disponibilités de chacun, le travail s'est concentré sur le site de Châteauneuf où l'artiste, Bertrand Guyot, s'est chargé de décrire, de mettre en place les oeuvres imaginées avec l'aide de tous les présents. Je n'ai pu être présente qu'une seule demi-journée et ma mère m'a raconté un peu comment cela s'était passé sur les autres semaines.


BERTRAND GUYOT


Toutefois, quand je suis arrivée sur place, une chose s'est imposée à mon esprit comme une évidence : Bertrand est l'artiste, le concepteur du projet et ses idées très arrêtées. Il fallait donc obéir à ses injonctions, à ses demandes sans discuter car il s'agissait de ses propres idées. Et si nous avions dû y mettre chacun notre grain de sel, cela serait devenu incontrôlable et aurait perdu tout intérêt. Je crois que tout le monde l'a compris et c'est pourquoi l'exposition est si réussie.


Pendant toute une après-midi, nous avons construit un mur de pierres sèches, avec Marie-Cécile et Marie Jeanne, nous avons démêlé des noeuds, étendu des bandes par terre, pris notre mal en patience, heureusement sous un soleil magnifique. C'était étrange de se dire que nous agissions de notre plein gré pour concrétiser le projet de quelqu'un et grisant de se sentir acteur, actrice de cet évènement. La personnalité de Bertrand y est pour beaucoup. En toute circonstance, il a gardé son calme, a respecté le travail des autres, a été l'homme orchestre d'un projet assez fou. En face de lui, nous ne pouvions que suivre sa bonne humeur. En calquant notre humeur sur la sienne, tout s'est très bien déroulé!


J'ai gardé des courbatures aux jambes et au dos pendant quelques jours, d'autres aussi qui sont restés sur le site pendant plus longtemps que moi mais c'était pour la bonne cause.


Le jour de l'inauguration, le soleil et la lumière étaient au rendez-vous. De loin, je voyais les ballons gonflés au dessus de la tour. Sur place, tout était prêt.


Les maires concernés, le président de la C.C et le public étaient là, nous étions tous fiers d'admirer le travail collectif, de le montrer à d'autres, de déambuler tranquillement dans le lieu qui avait retrouvé son calme et sa paix, magnifiquement décoré d'oeuvres en blanc.


Je vous invite bien-sûr à aller visiter le site jusqu'au 31 juillet. Ce sont des oeuvres éphémères qui évoluent avec le temps et la météo et elles sont bluffantes!


LE FILET








LA FONTAINE


Mes préférées? Le mur et le dallage, la fontaine, le labyrinthe et surtout, les arbres qui coulent!


Bienvenue chez nous!
LES ARBRES QUI COULENT