C'est la bonne nouvelle qui nous a été annoncée vendredi 21 octobre. , les images des scanners et Pet-scan montrent que les 2 foyers ganglionnaires se sont presque totalement résorbés ainsi que celui sur l'os de la clavicule. L'activité cellulaire est retombée. Leyla a bien répondu aux 2 premiers traitements, c'était le meilleur des scénarios. Reste à savoir s'il y aura besoin de radiothérapie, ce qui nous sera dit le 7 novembre.
Quand l'infirmière nous a annoncé cela, Leyla avait les larmes aux yeux. Ma mère en a pleuré et nous avons tous enfin pu respirer plus librement !
Leyla s'est bien battue pour ça! Fin septembre, suite à une aplasie et une infection, elle a passé 2 semaines à l'hôpital dans un état qui nous a laissé groggy! Nous n'étions pas prévenu de cela, qu'un patient sur dix peut réagir de cette manière, que Leyla était plus susceptible de réagir brutalement à la toxicité des produits. Nous avons assisté impuissant à une semaine de fièvre à 40° avec la tension à 7 et le pouls à 140. Quand la fièvre tombait sous le coup des analgésiques, c'était à 39° pendant à peine une heure et demie puis elle remontait illico. J'avais des sueurs froides à tâter son pouls qui n'avait plus rien du pouls de sportive qu'elle est, il était filant, palpitant bizarrement mais il me donnait des références. Parfois en la regardant et en tâtant son joli crâne, je trouvais qu'elle était fraîche. On appelait l'infirmière pour qu'elle prenne la température mais elle était quand même à 39.6... S'il n'y avait eu que cela.
Outre la fièvre, l'aplasie c'est à dire les valeurs des globules blancs, rouges et des plaquettes en dessous de la normale. Elle est tombée jusqu'à 5 d'hémoglobine! Pour la faire remonter, il a fallu 2 transfusions de globules et des boosters de moelle osseuse, type EPO.
Ensuite les diarrhées qui la vidaient de ses forces.
Et enfin "the last but not the least..." la mucite, une forme d'aphtes généralisés et uniformes dans la bouche et la gorge, conséquence des effets secondaires de la chimio. C'est ce qui l'a fait le plus souffrir. Sa salive était visqueuse, sa gorge gonflée, la douleur rayonnait dans les oreilles. Impossible d'avaler quoi que ce soit, de parler car les cordes vocales étaient prises. Elle était irritée dans tout le tube digestif, du début à la fin. Au début, les anti douleurs pour les enfants lui faisaient du bien car ils la faisaient dormir sans douleur. Mais quand elle se réveillait, ça revenait. Ils lui ont donc proposé de passer à la morphine avec une pompe automatique avec laquelle il est impossible de surdoser ni de devenir dépendant. Et ça lui a fait beaucoup de bien. Elle est passée sur l'échelle de la douleur de 9 à 7, voire 5. Ce qui fait une grande différence!
Elle est restée dans cet état près de 6 jours à ne rien pouvoir avaler ou presque, nourrie par perf avec de l'hydratation, des vitamines, des acides aminés mais ça va un temps. Elle a commencé à avoir les jambes qui gonflent à cause du manque de protéines et comme elle allait un peu mieux, il m'a fallu l'assister pour qu'elle se remette à manger. Ca n'a pas été une mince affaire. On organisait les journées autour des repas à venir en préparant la bouche, l'estomac et surtout la volonté à remanger. C'était tout un cérémonial au cours duquel avec persuasion et douceur, je devais l'amener à accepter d'avaler les repas hypercaloriques et hyperprotéinés. Ce sont des petites bouteilles au lait ou au jus de fruits très caloriques mais écoeurantes à force. Quand elle pouvait en boire les 3/4, c'était formidable et je la complimentais. Et en deux jours, ses jambes étaient redevenues normales. Puis ce furent quelques cuillérées de soupe, de purée ajoutées. Une semaine plus tard, elle avait retrouvé la sensation de faim. Aujourd'hui, elle a reprit 5 kilos et mange de bon appétit!
Il ne faut pas me reprocher mon souci du détail en ce qui concerne les maux dont a souffert ma fille. Car après cette période épuisante où nous nous sommes relayés auprès d'elle, son père et moi pendant 12 jours, j'ai été amenée à reconnaître que nous, quidam n'ayant jamais été confrontés à cette maladie auparavant de près ou de loin, nous ignorions totalement ce que le mot "cancer" signifiait! D'abord il fait peur et je peux le comprendre. Mais il y a des centaines de cancers différents : les lymphomes, les carcinomes, les mélanomes, les tumeurs, les nodules, les leucémies, les taches etc. Et il y a des centaines de traitements différents pour les soigner. Certaines personnes avec qui j'ai parlé m'ont dit qu'elles n'avaient pas perdu leurs cheveux, d'autres si. Que certaines supportent bien les effets secondaires, pas les autres. Que certaines avaient dû rester enfermées dans une chambre stérile, d'autres non.
On ne connait pas le cancer. Dans le meilleur des cas on voit la personne malade entrer à l'hôpital et en ressortir un certain temps plus tard guérie, on nous parle de chimios, de rayons X mais on ignore ce qui s'est passé et ce que le malade a vécu. Et j'ai l'impression que cette méconnaissance, ce mystère entretient la peur, nous pousse à en savoir le moins possible. Ce n'est pas une maladie honteuse ni contagieuse, on guérit 1 cancer sur 2 ou 3 dans la plupart des cas ce qui est follement encourageant et magnifique! Réfléchissons à cela quand il y a 30 ans, on annonçait à quelqu'un qu'il avait un cancer. C'était encore tâtonnant et très handicapant. Aujourd'hui, en partie grâce aux dons privés, la recherche a progressé énormément, les hôpitaux européens et internationaux travaillent de concert, les équipes rassemblent leurs expériences et font avancer les traitements. Leyla aurait pu être soignée de la même façon en Allemagne comme aux Etats-Unis.
Et dans son malheur elle a eu de la chance. Elle n'est pas encore guérie totalement au point de dire qu'elle est débarrassée définitivement de son lymphome mais elle est sur le bon chemin. Dans 2 ans, on sera fixé. Je dis qu'elle a de la chance car parmi les mamans avec qui j'ai lié connaissance à l'hôpital, d'autres enfants sont partis pour des parcours de soins s'étalant de 6 mois à 18 mois, voire sur plusieurs années. Comme la petite Alice qui a une forme rarissime de lymphome, 8 cas en 10 ans dans le monde et qui, malgré l'absence de visibilité, de prévision pour son cas, réagit bien aux traitements. Ou ce petit garçon en traitement depuis 6 ans pour 2 tumeurs au cerveau et une leucémie dont je ne connais que la maman. Cette maman est formidable, elle est là pour lui à temps plein, nous la soutenons du mieux que nous pouvons le matin au petit-déjeuner et en y repensant, lui et toute sa famille doivent retourner à la Réunion ces jours car il en a exprimé le désir. Et cet autre adolescent de l'âge de ma fille qui a déjà été soigné il y 2 ans pendant 18 mois et qui, aujourd'hui, refuse les traitements, se rebelle et que sa mère a toutes les peines du monde à faire retrouver ses esprits. On croise toutes les formes de la maladie dans les murs de Léon Bérard, toutes les tranches de la population et si Leyla ne doit y rester en traitement que 6 mois, nous disons merci mon Dieu !!
C'est vrai qu'on est confrontés à un autre monde. On prend des gens de tous les jours et on les plonge dans ce monde de l'oncologie. On en ressort différent.
Leyla l'a dit tout de suite au début de sa maladie : je sortirai forcément différente de cette maladie et si on refuse les changements que la maladie va avoir sur soi alors, on peut en mourir.
Elle a raison : sauf cas grave ou incurable, si on ne veut pas changer, on en meurt. C'est une suite d'acceptations dont le malade sort transformé ainsi que ses proches. On voit la vie sous un jour tellement différent après ça.
Je ne juge personne, chacun fait comme il le peut avec ce qu'il a. Et moi j'ai envie de partager, de montrer la réalité pour mieux faire connaître cette maladie. Quand les rescapés des camps de concentration rentraient chez eux, on leur faisait comprendre que la vie continuait et qu'ils devaient se taire. Je n'ai pas envie de réagir ainsi avec les survivants du cancer. Un conseil que je vais suivre moi-même à l'avenir : quand une personne me dira qu'elle est malade, je ne chercherai pas à la rassurer en lui disant des banalités, à écourter la conversation parce que j'aurai peur. Pour peu qu'elle ait envie d'en parler, je chercherai à savoir ce qu'il en est, à la soutenir du mieux que je pourrai et à penser à elle souvent.
Heureusement, notre entourage a été très compatissant et présent, nous avons une famille, des amis et des proches exceptionnels. Certains prient pour Leyla, d'autres pensent beaucoup à elle et toute cette énergie positive a agi aussi pour la mettre sur la voie de la rémission. On ne vous dira jamais assez merci !!!
bravo vous êtes êtes la bonne voie,Courage. mathieu.
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