Quand je regarde l'évolution du sport dans le milieu du fitness, je me rends compte que la période "cool" et "yoga" s'est essoufflée et n'aura pas durée longtemps.
Tous les 3 mois environ, on ne manque jamais de coachs apportant, inventant et présentant de nouvelles façons de faire du sport ensemble et en salle. Mais leur particularité tient dans la dureté de la méthode, de la violence que chaque participant doit se faire à lui-même pour, au nom du sacro-saint bien-être, se dépasser, se faire ...plaisir.
Leur message est clair, s'adressant le plus souvent à des gens déjà bien chargés négativement de stress dans leur vie active: la culpabilité vous attend si vous ne vous êtes pas fait mal, si vous n'avez pas dépassé vos limites, si votre coeur n'a pas atteint ses pulsations maximales ou si vous avez osé flancher avant la fin du cours.
On se trouve dans un pur délire judéo-chrétien! Faites-vous mal et vous serez exaucé! Faites-vous mal et vous atteindrez le nirvana! Si vous ne le faites pas, vous n'aurez rien!
Un dictateur ne s'y prendrait pas autrement pour soumettre un peuple: "Suivez-moi, peu importent les souffrances, les humiliations. Je suis le seul à pouvoir vous apporter la solution. Obéissez-moi!"
Le coach dit: "Suivez-moi, peu importent les souffrances au son de la musique en compagnie d'instruments de torture, les humiliations quand vous n'arrivez pas à faire un geste faute de force ou de coordination. Je suis le seul à pouvoir vous apporter la solution dans ma salle surchauffée afin de suer abondamment, perdre du poids. Obéissez-moi!"
Je veux dire par là que oui! on peut asservir des gens avec la pratique d'un sport comme on peut les maintenir sous addiction avec le Coca-light, la sortie du nouvel i-phone ou les soldes.
Doit-on raisonner ainsi: "Si je cours pas, je fume. Si je ne fume pas, je cours"?
Je pense que dès lors qu'on DOIVE faire quelque chose et j'entends par là, faire son heure de gym, de body fitness, de course à pied etc..., il est essentiel de se poser la question suivante: si on ne le fait pas, cela va t-il poser un problème? Si la réponse est oui, effectivement il y a un problème... de conflit.
Le stress vous envahit et la chose que vous DEVIEZ faire devient une source de conflit intérieur si vous ne la faites pas.
Et où est le bien-être s'il faut se maudire de n'avoir pas pu faire sa séance à cause d'un quelconque contre-temps?
Où est le bien-être si vous allez à la salle de sport, si vous faites vos exercices pour faire d'abord plaisir au coach?
Il me semble dommage d'appliquer dans le sport les mêmes techniques que dans la finance ou la politique: forcer les gens à faire ce qu'on leur dit, pour leur bien.
Je ne remets pas en question le fait que des gens aiment se retrouver dans une salle pour danser, suer, se muscler, se défouler. Je remets en question le fait qu'on leur propose de plus en plus de choses très violentes, dures, à intensité maximale alors que 90% d'entre eux n'y sont pas préparés. Et qu'on les entraîne dans le cercle vicieux de l'addiction avec un discours culpabilisant, où les moins préparés seront la plupart du temps en échec.
Les plus forts survivront. Mais qu'emmèneront-ils comme valeurs avec eux? Celles que justement de plus en plus d'entre nous ne partagent plus: la force, la violence, une image corporelle unique, la recherche effrénée du plaisir et partant, l'assouvissement des désirs.
Je me suis moi-même laissée prendre par certains discours, certaines méthodes mais sans jamais réussir à être aussi appliquée que le coach le voulait. Un réflexe de survie de mon corps?
Il est possible de faire autrement.
Il est possible de ne pas se laisser embrigader par les discours extrêmes même dans ses loisirs et d'assumer ses choix. Il est possible de s'aimer, de faire du sport en respectant son corps.
Il est possible de s'accepter tel qu'on est, debout devant son miroir et d'oublier ses peurs.
Chacun a sa solution en lui. Pour son bien-être.
Et de le faire partager!